
Le dernier jour du Garorock 2024 a commencé plus tôt pour nous, car un artiste de renom nous attendait en backstage… En effet, Apashe nous a accordé un peu de son temps pour répondre à nos questions ! De son style si particulier à sa passion pour la réalisation de clips, en passant par le futur de la musique lié à l’intelligence artificielle… Retrouvez l’intégralité de ses propos ci-dessous :
Salut ! Peux-tu te présenter pour ceux qui ne te connaissent pas ?
Bonjour ! Moi c’est John, connu sous le nom d’Apashe. Je suis Belge mais je vis à Montréal, au Canada. Je fais de la musique difficile à décrire, c’est un mélange d’électronique et de musique classique.
C’est la question de base du site… Quelle est ta définition de la musique électronique ?
Je trouve que ça ne veut plus rien dire aujourd’hui. La musique classique, le métal, la pop et l’électro sont composés de la même façon. C’est-à-dire que tout le monde utilise un ordinateur aujourd’hui pour la faire. Je pense que ça avait du sens de la décrire avant car c’était des synthétiseurs, c’était plus électrique qu’acoustique. Mais plus aujourd’hui.
C’est un pari risqué de mélanger musique orchestrale et Electro. Imaginais-tu à l’époque que le style que tu qualifies de Majestic, allait être une réussite totale ?
Des gens l’avaient déjà fait un peu dans le passé. Ça a été des sources d’influences pour moi. Comme ça marchait à l’époque, je ne suis pas surpris que ça puisse fonctionner maintenant. C’est juste que j’ai l’impression que c’était plutôt un morceaux à droite, à gauche, dans le passé. Comme Adam F par exemple, qui était un beatmaker plus hip-hop mais qui faisait jungle aussi. Il a utilisé la musique classique pour faire des beats hip-hop, et ça a toujours été incroyable. Mon adolescence était un peu basée là-dessus.
Comment as-tu fait pour créer ta signature sonore si reconnaissable ?
C’est sur que le choix d’instruments et de samples, que ce soit très cuivrés ou très cordes pour tout ce qui est classique, ça se remarque et ça se définit un peu comme un son. Que les gens l’associent à moi ou à un mouvement en général d’un ensemble de tracks, ça peut décrire ce que je fais oui !
On sait que la Bass est en pleine expansion, notamment grâce à Tik Tok. L’année 2024 sera-t-elle l’année de la Drum’n Bass ?
Personnellement, j’ai grandi en écoutant de la Drum’n Bass donc j’ai l’impression qu’elle a toujours eu une grande place dans ce que j’écoute. Par contre, c’est sûr que Chase & Status et d’autres sont peut-être en train de démocratiser cela encore un peu plus. J’avais l’impression que ça se démocratisait plus en Amérique du Nord, là où ça faisait dix ans que c’était mort, parce qu’il y en avait avant. En Europe, il y a toujours eu des immenses festivals Drum’n Bass, peut-être un peu moins en France. Donc c’est possible que quelque chose se passe en ce moment, en France et aux États-Unis (sourire) !
Après avoir convié Busta Rhymes et EARTHGANG sur ton dernier album, produire pour des rappeurs serait-il un challenge intéressant pour toi ?
J’aimerais bien, ouais ! Ça m’est déjà arrivé. Après, j’ai encore beaucoup de choses à écrire seul, que j’ai envie de faire de mon côté. Mais dès que je vais me fatiguer à me mettre trop en avant, je pense que je me mettrais un peu dans l’ombre et que je ferais des beats pour d’autres gens.
Tes musiques sont souvent accompagnées de clips avec une dimension cinématographique détaillée et visuellement impressionnante. Quelle est l’importance pour toi d’avoir un clip aussi travaillé pour accompagner ta musique, et quel impact penses-tu que cela a sur ton public ?
À la base, je pense que ça vient du fait que j’aime autant faire des clips que produire de la musique. Diviser mon temps en deux, ou presque, c’est un réel kiff. L’un fonctionne bien sans l’autre, même si dans mon cas, je pense qu’il est indispensable. Au début, ça n’avait pas d’impact concret. Mais maintenant que les gens ont l’habitude de toujours voir des vidéos avec ma musique, ça fonctionne. C’est juste que je suis arrivé un peu tard dans le game des clips (sourire). Maintenant, plus grand monde n’investit beaucoup de temps et d’argent dans les clips. Moi, je mets toute mon énergie là-dedans ! Je ne le fais pas pour me faire découvrir, mais vraiment par kiff (sourire).
Dans ton album Antagonist, tu nous plonges dans cet univers cinématographique avec des compositions qui ont une ambiance assez sombre. Tu as exprimé ton envie de travailler sur les films de Denis Villeneuve. As-tu d’autres désirs similaires, comme travailler sur la bande-son d’une série ou pour la bande-son d’un jeu vidéo ?
Oui tout à fait, j’aimerais beaucoup ! Mais ça, c’est un peu comme faire des beats pour les rappeurs. C’est très difficile de diviser mon temps, et donc je ne pourrais pas prendre un contrat aussi gros comme la B.O d’un film tout seul. Ça me prendrait tellement de temps que je devrais mettre en pause beaucoup de tournées, shows et choses personnelles pour pouvoir le faire. Mais par contre, c’est dans mes rêves ! Donc un jour ou l’autre, j’aimerais le faire. Tout ce qui touche à la science-fiction par exemple, je suis trop chaud. Pour les jeux-vidéos, ce n’est pas un secret mais je devais faire Need For Speed pendant la pandemie. Finalement, ils ont reporté le projet et après je n’étais plus disponible pour le faire. Ça tombait bien pour moi car c’était plus calme niveau show pendant la pandémie. Sinon, je rêverais de bosser avec quelqu’un comme Labrinth sur des choses comme Euphoria. J’ai été beaucoup touché par sa B.O et par sa musique de manière générale donc je rêverais de bosser avec lui sur quoi que ce soit. À mon avis, Euphoria a quasi-terminé la série, mais je serais très chaud pour quelque chose de similaire.
Parmi tous les instruments que tu utilises dans tes compositions orchestrales, y’en a-t-il un en particulier qui te fascine ou qui te touche plus que les autres ?
Ouh.. Ça, c’est très délicat comme question (rires) ! C’est sûr que ce serait un cuivre. Mais je joue en ce moment avec huit cuivres sur scène, et si j’en choisis un, je mets un peu à dos les autres (rires). Donc c’est délicat, mais j’ai l’impression que si tu écoutes beaucoup ma musique, tu peux deviner lequel (sourire).
Nous avons vu que tu t’intéresses beaucoup à l’IA. Il y a eu énormément de changement en l’espace de très peu de temps. Comment penses-tu que l’IA va continuer à transformer la manière de composer et de produire dans les prochains mois, années à venir ?
C’est une bonne question. Je pense que ça évolue tellement rapidement que ça va un peu dans tous les sens. À mon avis, on va continuer à avoir des outils super performants qui vont nous faciliter la tâche, nous aider à être plus rapidement créatifs. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, tu peux déjà demander à l’IA de te composer un truc. Et rien que ça, c’est une source d’inspiration. Donc si tu ne sais pas quoi écrire comme musique, tu peux déjà te laisser inspirer par l’IA. Quitte à ne rien utiliser de ce qu’elle fait, mais juste pour te ressourcer. Sinon, tu peux nourrir une IA d’un instrument pendant quelques minutes, comme un saxophone ou peu importe. Tu lui donnes dix minutes de saxophone qui joue plusieurs types de notes, et tu peux rejouer n’importe quelle mélodie que tu siffles ou que tu chantes. Rien que ça, je trouve que c’est extraordinaire.
Est-ce que tu trouves que c’est plus fascinant ou effrayant ?
Ça, je trouve que c’est fascinant parce que c’est facilement utilisable pour tout le monde. Mais, je pense que ça ne remplacera jamais l’humain derrière, comme quand moi j’enregistre des orchestres. Ça donne des outils à toutes les personnes qui n’ont pas accès à ça. Personnellement, j’ai quand même commencé à écrire toute ma musique à l’ordinateur avec des instruments qui ne sonnaient pas très réalistes. Aujourd’hui, les instruments via l’ordi sonnent vraiment mieux qu’avant. Mais ça ne remplacera toujours pas un vrai musicien. Même si l’IA va réussir à tricher sur ça, les musiciens auront toujours leur place dans la musique, je ne m’inquiète pas trop pour ça. Par contre, c’est plutôt l’entre-deux… Le marché des gens qui font des plugins vont se faire bouffer par l’IA. Parce que, eux, font déjà des « faux » de base. Mais c’est la nature même de ce business. Depuis que les ordinateurs existent, les plugins se font progressivement remplacer avec le temps. C’est juste que maintenant, tout ce qui sera fait par ordinateur sera fait avec une IA.
Dans le cadre de la tournée “Antagonist”, tu as eu l’occasion de jouer dans plusieurs salles françaises dont l’Olympia. Quel lien as-tu désormais avec le public français ?
J’ai découvert le public français cette année (sourire). Autant je faisais toujours un show annuel en France, mais là il y a vraiment quelque chose qui s’est produit. Je trouve ça génial d’avoir vu que les gens se déplacent partout, autant dans les grandes que les petites villes. Le public français est au rendez-vous, il est loyal et il a une super bonne énergie. C’est incroyable !
Quels sont tes projets à venir ?
Pour la France déjà, des plus gros shows ! Moins, mais plus gros (sourire). Comme ça, on peut ramener plus de musiciens sur scène. Niveau musique, je n’ai pas encore terminé le second album symphonique. Une version de l’album est sortie, mais là on va sortir des remixes. Où il y aura des versions VIP, je vais revisité des morceaux. Il y a aussi toutes les versions symphoniques qui vont sortir, sans l’électro. Tout est déjà enregistré, j’ai juste besoin de les remixer et de les peaufiner. Et comme on a fait la tournée de cet album en Amérique du Nord et en Europe, là on le joue au Jazz Festival à Montréal. On va tout enregistrer avec l’orchestre et on va le mettre sur Internet. Ça va être une manière de clôturer cet épisode et tout le monde pourra l’écouter et le regarder sur YouTube !
Merci d’avoir répondu à nos questions ! Un dernier message à faire passer ?
Merci de m’avoir reçu, j’ai vraiment hâte de jouer à Garorock !
Préparation : Jooffrey, Dnzl, Mike, Vincent & Valso / Réalisation et retranscription : Valso

[…] tard. Arrivés à notre lieu de rendez-vous, on tend le micro à Apashe (interview à découvrir ICI). C’est un honneur pour nous de poser nos questions au producteur belge, l’ensemble de […]